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Jeudi 29 février 2024

La SAFER répondra devant la justice de la vente du grand cru classé à 72 millions ?


En balayant les incidents de mise en état, la cour d?appel donne à la famille Cuvelier (clos Fourtet) son procès de la vente du château Beauséjour héritiers Duffau-Lagarosse à la famille Courtin (cosmétiques Clarins) par la Société d?Aménagement Foncier et d?Établissement Rural.

La SAFER répondra devant la justice de la vente du grand cru classé à 72 millions €

Ayant tenté de tuer dans l’?uf la remise en cause de ses choix dans la vente par substitution d’un premier grand cru classé de Saint-Émilion par un incident de mise en état, la Société d’Aménagement Foncier et d’Établissement Rural (SAFER) vient d’être de nouveau recalée par la justice*, cette fois par la deuxième chambre civile de la cour d’appel de Bordeaux. Dans son jugement du jeudi 29 février, la juridiction rejette toutes les demandes procédurales de la SAFER pour faire annuler l’attaque de la famille Cuvelier (possédant le clos Fourtet à Saint-Émilion et le château Poujeaux à Moulis-en-Médoc) et son candidat proposé à l’installation, Grégoire Pernot du Breuil (directeur d’exploitation des vignobles Nicolas Thienpont) contre la vente contestée, depuis 2021, du château Beauséjour héritiers Duffau-Lagarosse (6,75 hectares de premier grand cru classé B de Saint-Émilion). Propriété acquise pour 72 millions d’euros par la famille Courtin (groupe de cosmétiques Clarins) en installant, via un bail à ferme, l’ingénieure agronome et ?nologue Joséphine Duffau-Lagarrosse (huitième génération de la famille à la tête de la propriété, son père en ayant été le gérant).

Le conseil d’administration de la SAFER de Nouvelle-Aquitaine ayant sélectionné le 7 avril 2021 la candidature de la famille Courtin et non celle de la famille Cuvelier, qui ne le digère pas comme elle avait été sélectionné préalablement par les propriétaires du cru, la famille Duffau-Lagarosse (dans une décision du 4 novembre 2020). Au terme d’une audience tendue devant la cour d’appel ce lundi 15 janvier, les parties et leurs avocats ont pu étaler leurs arguments pour défendre que seule la décision du conseil d’administration de la SAFER était attaquable (pour les candidats écartés) ou que seul l’acte de notification de la décision pouvait être remis en question (pour la SAFER et les acheteurs choisis). Pour la juridiction, « ce courrier n’est que l’acte de notification de la décision qui a pour objet de la rendre opposable à ceux à qui il s’adresse. Il ne peut être considéré comme une décision en soi, c’est-à-dire la décision de rétrocession selon la thèse défendue par la Safer, puisque pour qu’il y ait une décision encore faut-il que cette décision émane d’une autorité ayant pouvoir de décider. En l’espèce, le seul organe investi d’un tel pouvoir ne peut être que le conseil d’administration qui n’a délibéré que le 7 avril et a pris la décision d’attribution. Il n’y a donc pas eu d’autre décision dans cette affaire. »

Si les questions de fond du dossier ont déjà été évoquées lors de l’audience, la cour d’appel rappelle dans son jugement qu’« il appartiendra au juge du fond de se prononcer sur les griefs reprochés à la SAFER quant au choix retenu et dans l’hypothèse : de l’annulation de la décision d’attribution, sur la nullité ou la caducité de la vente et des actes subséquents (convention de mise à disposition, baux à ferme) qui en découle nécessairement ; du rejet des prétentions de la SAS Compagnie de Villemetrie et de M. Pernot du Breuil fondées sur les dispositions du Code rural et de la pêche maritime, de déterminer si leur action s’appuyant également sur les textes du Code civil doit ou non aboutir dans la mesure où un tiers peut toujours invoquer la nullité absolue d’un contrat dont il n’est pas partie. »

À suivre prochainement au tribunal de Libourne… En attendant un nouvel appel à Bordeaux, voire un détour en Cassation ?

 

* : Après une décision du tribunal judiciaire de Libourne en mai 2023 allant dans le même sens.